L’opération d’une épicerie peut s’avérer être une activité commerciale lucrative. Selon l’INSEE, il y aurait plus de 20,000 supérettes et épiceries de proximité en France. La moitié de ces commerces seraient des franchises.
L’activité d’épicerie de proximité est en progression, dû à plusieurs facteurs. Tout d’abord, la population française est une population vieillissante. Les personnes âgées préfèrent faire leurs courses en épicerie ou supérette plutôt qu’en grande surface. Par ailleurs, on remarque une tendance générale : la consommation de proximité fait son grand retour.
En effet, les centres commerciaux sont de plus en désertés par les consommateurs, qui cherchent à réduire le temps consacré aux courses alimentaires. Les grandes enseignes ont bien compris ce changement de comportement et déclinent de plus en plus leur marque en commerces de proximité et s’implantent en centre-ville (par exemple : les enseignes Carrefour City, Carrefour Express, Carrefour Bio).
Bien que le secteur de l’alimentation générale se porte bien et offre de bonnes perspectives, l’ouverture d’une épicerie reste une activité d’entrepreneuriat. Il vous faut donc étudier avec soin les options de structure d’entreprise, les démarches requises, le budget initial, les permis à sécuriser, les obligations légales, entre autres.
Le type d’épicerie
Il existe deux grandes catégories d’épiceries : l’épicerie fine et l’épicerie généraliste.
L’épicerie généraliste procure tous les produits de base à la population avoisinante. On retrouve ce type d’épicerie dans les centres-villes. L’épicerie généraliste offre des horaires élargis, qui conviennent aux consommateurs pressés ou à une clientèle vieillissante qui souhaite faire ses achats dans un commerce à taille humaine, pour le côté relationnel.
On retrouve également ce type d’épicerie dans les petits villages qui ne sont plus desservis par les commerces spécialisés. Dans ces cas, l’épicerie généraliste joue un rôle plus important, elle devient un commerce maintenant le lien social en offrant de multiples services tels que relais-colis, dépôt de pain, distributeur de journaux, gaz ou tabac, voire même d’argent.
L’épicerie fine procure des produits spécialisés, qui ne sont pas des produits de première nécessité. On compte ainsi des épiceries fines vendant des produits de luxe, des produits biologiques, ou des produits provenant d’une région ou d’un pays spécifique (tels que les produits asiatiques ou italiens).
Ce type d’épicerie répond aussi à la demande de consommateurs soucieux de bien manger, et à la tendance générale de passer à une consommation locale. On compte donc des épiceries de mono-produits tels que les épiceries de thé, les épiceries de miel et confitures, les épiceries de condiments, mais aussi des épiceries « concept »: épiceries bio, épiceries sans emballages, épiceries italiennes.
Les formations, diplômes et compétences
Il est tout à fait possible d’ouvrir votre épicerie sans avoir suivi de formation ou obtenu de diplôme spécifique. La profession est totalement libre d’accès, sauf si l’épicier compte exercer une activité artisanale en parallèle, par exemple, la boulangerie.
Ceci dit, il est nécessaire de pouvoir justifier d’une expérience professionnelle d’au moins 3 ans en tant que dirigeant d’entreprise, indépendant ou épicier salarié pour pouvoir ouvrir son épicerie sans diplôme. D’autre part, il est recommandé de suivre l’une des formations suivantes avant d’ouvrir son épicerie : CAP employé de commerce, CAP primeur, CAP vente de produits spécialisés (avec option produits alimentaires), BAC Pro Commerce ou BAC Pro vente et conseil qualité en produits alimentaires.
L’activité d’épicerie de proximité demande par ailleurs d’avoir certaines compétences. Pour réussir, l’épicier doit avoir le sens de l’accueil, la fibre commerciale, savoir gérer ses stocks avec efficacité, avoir une bonne rigueur dans la gestion de ses finances, et surtout, comme tout bon entrepreneur, se montrer patient et persévérant.
La réglementation
L’épicier se doit de respecter des obligations dans le cadre de son activité :
- Les règles d’hygiène alimentaire, le respect de la chaîne de froid, l’interdiction pour une personne malade de manipuler les produits alimentaires
- Les normes incendies et accessibilité : obligation d’avoir deux sorties (comme pour tout établissement recevant du public), une sortie sur rue pour l’évacuation rapide du public, la possibilité d’accueillir des personnes à mobilité réduite ou en situation de handicap.
- L’affichage des prix en TTC (toutes charges comprises)
- Avoir des toilettes disponibles
- Faire contrôler les balances de pesage par un organisme agréé, tous les deux ans, pour en assurer la conformité
- Obtenir le permis d’exploitation si l’épicier souhaite vendre de l’alcool. La licence peut être obtenue en faisant une déclaration à la mairie. L’épicier doit aussi obligatoirement suivre une formation “permis d’exploiter” avant d’ouvrir son épicerie
La vente de tabac en épicerie se fait selon des conditions spécifiques. Le commerçant doit avoir la nationalité française ou européenne, avoir un casier judiciaire vierge, produire un certificat médical justifiant de sa condition physique, et suivre une formation imposée de 3 à 4 jours. La vente de tabac ne peut se faire que si l’épicerie est enregistrée en entreprise individuelle ou en SNC.
Enregistrer son activité et choisir son statut juridique
Comme l’activité d’épicerie de proximité est une activité commerciale, l’organisme compétent vers lequel se tourner pour enregistrer la création d’entreprise est la Chambre de Commerce et de l’Industrie (CCI). L’entrepreneur doit s’assurer que le nom n’est pas déjà utilisé ou protégé. La base de données de l’INPI peut servir à cette vérification.
Les démarches d’enregistrement vont dépendre du choix du statut juridique. Chaque statut offre son lot d’avantages et d’inconvénients. Si l’entrepreneur souhaite une petite structure, le statut d’auto-entrepreneur ou d’entreprise individuelle convient le mieux. Pour les grosses épiceries et les épiceries fines (dont les coûts d’approvisionnement sont élevés), il est recommandé d’opter pour une société.
- Le statut d’auto-entrepreneur : La création d’activité se fait sous des mesures simplifiées (déclaration d’ouverture sur le site de l’URSSAF). L’entrepreneur bénéficie d’obligations comptables allégées et est exonéré de la TVA jusqu’à un certain seuil. Cependant, ce statut n’est possible que si le chiffre d’affaires est plafonné à 176 200 euros, et les charges ne seront pas déductibles.
- L’entreprise individuelle (EI) : L’entrepreneur bénéficie de mesures simplifiées pour créer son activité. Cependant, il lui faudra tenir une véritable comptabilité d’entreprise. Sa responsabilité ne sera pas limitée aux apports et il ne sera pas toujours exonéré de la TVA (cela dépendra de son activité).
- La Société par Actions Simplifiées (SAS) : Ce type de structure laisse à l’entrepreneur la liberté de créer les statuts. Sa responsabilité est limitée aux apports, et il n’y a pas de capital minimum à apporter (une somme symbolique de 1 euro est demandée). Par contre, sous ce statut, les charges sociales sont importantes.
- La Société à Responsabilité Limitée (SARL) : La création d’entreprise sous cette structure est simplifiée et ne demande également pas de capital minimum (1 euro symbolique). La responsabilité est limitée aux apports. L’entrepreneur peut bénéficier des avantages du statut de la micro-entreprise. Il faut cependant un minimum de deux associés pour créer son entreprise SARL, rédiger des statuts très formalisés et tenir une véritable comptabilité.
- La Société par Actions Simplifiées Unipersonnelle (SASU) : La création d’entreprise peut se faire avec un seul associé, sans capital minimum (1 euro symbolique). Le patrimoine de l’entrepreneur est protégé. Cependant, sous ce statut, le développement est difficile du fait qu’il n’est pas possible d’ajouter d’autres associés.
L’apport financier initial
L’épicerie de proximité est une activité qui nécessite un budget important. La création de la structure, dépendant du format choisi, peut elle-même entraîner un coût, selon qu’il soit nécessaire ou pas de faire appel à des experts légaux ou comptables (par exemple pour la rédaction des statuts et la publication du projet dans un journal d’annonces).
Les autres dépenses de démarrage et les investissements nécessaires incluent :
- Les frais pour ouvrir les compteurs eau, gaz, électricité
- Les formations obligatoires (telles que pour la vente d’alcool)
- Le paiement du droit au bail, la caution et le dépôt de garantie
- Les coûts de travaux d’aménagement
- L’acquisition de matériel (vitrines frigorifiques, rayonnages, bureau, ordinateur, imprimante etc)
- Les coûts d’enseigne, de la communication et de la publicité de lancement
- L’achat d’un véhicule utilitaire
- L’acquisition des stocks (à noter que les stocks peuvent représenter plus de 70% du chiffre d’affaires annuel)
- La trésorerie pour démarrer l’activité
- Dans les cas de franchises, les droits d’entrée de réseaux (coûts largement variables, allant de 30 000 à 400 000 euros pour certaines franchises)
Si l’entrepreneur opte pour le rachat d’une épicerie, il faudra prendre en compte le coût de rachat du fonds de commerce, représentant 20 à 30% du chiffre d’affaires TTC (jusqu’à 50% pour une supérette).
Dans tous les cas, il n’est pratiquement pas possible d’ouvrir une épicerie sans apport. Les organismes de crédit demandent une injection de capital de la part de l’entrepreneur, même si le montant est faible. Il est recommandé de monter un business plan solide pour rassurer les investisseurs. Le business plan devra présenter une analyse du marché local pour s’assurer de l’existence de clients potentiels et de leurs attentes, pour identifier les concurrents présents et pour déterminer le chiffre d’affaires prévisionnel, en tenant compte des prix pratiqués et du pouvoir d’achat des futurs clients.
Réaliser des bénéfices
Comme toute activité entrepreneuriale, la réalisation de bénéfices dépend de la propension de l’entrepreneur à établir des stratégies de vente et gagner des clients, en :
- proposant des produits qui mènent à fidéliser les consommateurs (pain, tabac, journaux)
- offrant des opérations spéciales, des services ou des tournées de livraison
- faisant fonctionner le bouche-à-oreille pour la qualité de service
- proposant des produits de producteurs locaux et un rayon de produits bio
- optimisant la rotation de produits sur leurs rayons
- maintenant des marges de 30 à 35% en restant raisonnable dans les prix proposés
Souscrire à une assurance
De nombreuses assurances sont disponibles sur le marché pour protéger l’entrepreneur et son activité. Certaines assurances sont obligatoires, alors que d’autres sont facultatives, mais fortement recommandées. Parmi les assurances obligatoires, il y a la mutuelle entreprise si vous avez des salarié, et la prévoyance d’entreprise (pour les cadres et les non-cadres).
L’assurance des véhicules à usage professionnel ou mixte, (obligatoire) peut être utilisée si l’entrepreneur déclare à son assureur l’usage de son assurance personnelle dans le cadre de sa profession. L’assurance facultative mais très fortement recommandée est la multirisque professionnelle, cette dernière, en plus de couvrir votre local commercial et votre stock, est souvent accompagnée de la RC Pro et de la RC exploitation.
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La franchise : une bonne alternative ?
Le secteur de la franchise est en plein essor, au moins 50% des épiceries opèrent sous des franchises. Il existe des franchises dans tous les domaines de l’épicerie de proximité.
- Les épiceries fines : Intercaves, Leonidas, de Neuville, Comtesse Dubarry
- Les épiceries bio : L’Eau Vive, Le Grand Panier Bio, Biomonde
- Les épiceries mono-produit : Ladurée, Kusmi Tea
Les enseignes de grande distribution ont aussi développé leurs propres franchises : Carrefour Proximité, Spar, Casino Shop.
L’avantage d’opérer sous franchise est de pouvoir bénéficier de l’aide et de l’accompagnement du franchiseur pour lancer et développer son activité. L’entrepreneur doit, en revanche, payer des redevances au franchiseur, en plus de ses propres charges. L’entrepreneur doit aussi accepter de ne pas opérer en totale indépendance car il y a les normes du réseau de franchise à respecter. Cependant, ce sont ces règles qui font le succès de la franchise et il est dans l’avantage de l’entrepreneur de suivre ces indications imposées.